CLISSON 1 / AIGREFEUILLE : AUX AVEUX !

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C’était le 17 octobre. Une soirée automnale. J’aurai pu vous raconter la poésie d’un soir, à Aigrefeuille, la nuit qui descendait doucement sur nos épaules, et annonçait une douce soirée amicale à quelques encablures de la maison. Les Berceuses qui s’échappaient de la radio de Didier qui nous conduisait doucement vers notre destination (double ironie réservée aux connaisseurs). Cette rencontre était en quelque sorte un cérémonial. L’épure de Clisson1, tout juste sortie des fonds baptismaux, s’en allant retrouver Aigrefeuille, frère ennemis, sur son terrain. Et nous de retourner sur les pas des défaites de l’an passé, heureux d’y revenir armés de notre seule ténacité et bonne volonté, un brin d’orgueil peut-être ? Fiers de rencontrer chez lui le vainqueur du championnat de l’an dernier.

J’hésitais à vous raconter combien nous oscillions entre insolence et humilité, valsant de l’autoflagellation aux larmes et à la provocation. Vous dire comment, très vite, au-delà de toute considération, la bonne intelligence entre nous l’a emporté.

J’aurai pu vous raconter que c’était un jour béni, un jour de concorde. Un jour de Communion solennelle. Et filer la métaphore des cérémonies catholiques allant du baptême au mariage, en passant par la communion et bientôt la confirmation.

Je prévoyais de vous raconter ce que fut cette victoire. Méritée. Bataillée. Arrachée, En présence d’une équipe d’Aigrefeuille très présente, que nous vainquîmes sur le fil (26/24 – 26/24 – 25 -21).

J’aurais pu.

Mais franchement, ça m’emmerdait un peu…

Et j’ai réalisé qu’à bien y regarder, nous n’étions pas les chevaliers blancs que j’essayais de vous décrire. Ok le lien privilégié, la communion, le gout des autres et bla bla bla… oui, il y avait certainement une certaine pugnacité. Pas faux. Un certain panache aussi (vous avez été beaux mes amis !). Mais la motivation suprême n’était pas tant de bien jouer, de nous battre sans compromis pour notre bonne cause commune, ou de jouer pour la beauté du geste à « l’important c’est de participer ». Oh non…

Non, la seule cause qui nous importait vraiment, vous le savez bien, et nous le savons aussi lorsque nous sommes suffisamment lucides pour le reconnaitre… c’était nous-même !! « un brin d’orgueil » écrivais-je plus haut ?! AH AH AH : laissez-moi rire : un train entier de vices réunis oui !! Ecoutez plutôt :

Le Procureur [1]: Accusé CLISSON 1 LEVEZ VOUS !! Vous êtes Coupables !

CLISSON 1 : Nous sommes coupables ? Mais grands dieux, de quoi ? C’est une république bananière ici ? On veut un avocat !

Le Procureur : Votre faute ? Votre grande faute ? Vous prétendez l’ignorer ? Vous ajoutez le mensonge à la liste de vos crimes?! Mais vos infractions aux bonnes mœurs et à l’ordre moral sportif sont légion. Tous les vices réunis ou partagés, vous êtes vils et vicieux, gourmands, fumeurs invétérés alternatifs, ivrognes réunis, qui couvrent leurs dérives en s’abritant derrière de jolis mots. Alcoolo en mode « oui moi je suis esthète et je ne bois que des vins bios ». Certes, oui, mais tu bois, bien, et trop. Je vous entends d’ici : « Mais enfin, je ne bois qu’entre amis, pour la sociabilité et… » : Stop. Arrête, ne cherche pas : les juré reconnaitront en vous les coupables. Coupables de colère, d’avarice, d’enflure de l’égo. Paresseux à vos heures et avares de le partager avec tous. Vous êtes Coupables de crimes en bande organisée, Coupables d’envie lorsque tout réussit aux autres et vous laisse sur le banc de touche. Coupable de colère parfois, contre vous-même, rarement contre les autres ce sera la seule circonstance atténuante que nous retiendrons dans ce plaidoyer. Tout ensemble Coupable je vous dis.

Vous niez ?!

S’il le faut j’insiste et je reprends : Et la vanité qui vous fait partir à 6 pour nous battre contre les vainqueurs de l’an dernier sans demander d’aide à quiconque. Ce n’est pas pécher par orgueil ca?!

Ah ah : je vous vois taiseux là. Vous réalisez l’étendue de vos crimes ? Crime en bande organisée en plus.  Et avec Récidive !!

Vous voulez un avocat ?! Mais mon dieu que peut faire un avocat devant un dossier accablant de la sorte ?

Plaider coupable ? Demander un aménagement de peine ?

Que dirait-il au juste :

L’avocat[2] : « Mes clients sont blâmables. Ne cherchez plus, ne creusez plus, révoquez vos témoins, faites partir les experts, Otez toute pression des jurés ahuris. Il n’y a rien de plus à dire. Ils sont fautifs. Et je leur ai conseillé de vous le dire. Ils sont coupables de crimes, avec complicités, en bande organisée. Crime en col … euh, sans col en fait, mais crime en t-shirt ou pas, ils sont responsables.

Pourquoi croyez-vous qu’ils sont allés a Aigrefeuille le 17 octobre à 20h30 ? Pour la cueillette des fraises ? Faire de l’action sociale ? Non mais sans rire. Ce sont mes clients, et je ne devrais pas vous dire ça, mais ils se moquent de vous. Ils vous font des sourires, discrets, pudiques en diable ; Vous montrent leur beau profil en espérant vous séduire, mais la question que je vous pose, et à laquelle il importera mesdames messieurs les jurés que vous répondiez avant d’entrer en voie de condamnation, la question qui les sauvera peut-être, c’est… de quel forfait sont-ils le plus coupable ?

Je ne vous ferai pas l’affront de vous rappeler les sept péchés capitaux, vous connaissez le code moral judéo-chrétien mieux que moi, mais tout de même, pour mes clients ignares (en plus du reste) je vous dois de les énumérer et examiner l’un après l’autre

·        Avarice : Croyez-vous qu’ils aient amené des fleurs, une bouteille, enfin quoique ce soit pour apaiser la légitime déception de leurs adversaires ? Que nenni, ils ont tout pris, sans y mettre le prix, prendre sans rien donner, sans rien laisser, comme d’habitude : coupables d’avarice ils sont !

 

·        Envie : Ils nient l’envie de gagner, mais ne sont pas crédibles. Pensez-vous un instant que ces avortons ridicules, avec deux filles sur le terrain, auraient eu la moindre chance de gagner, même un set, si l’envie de les avait pas tenaillés profondément d’en foutre une bonne raclée aux vainqueurs de l’an dernier ? L’envie de vaincre, l’envie de pouvoir, l’envie de gagner, l’envie d’être calife à la place du calife, l’envie de gagner… vous les voyez maintenant les coupables d’envie ?

 

·        Colère : Parlons un peu de la colère… oh, certes, elle était larvée, pas de violence, colère rentrée, colère froide, explosive par instant sur quelques balles litigieuses, mais elle était là, la ravageuse qui déplace les montagnes et manque de blesser. Mais ils sont bien élevés les coquins et ne l’ont pas montré sous son jour le plus vil, et peut-être est-ce là la moindre de leur tare ? je vous laisserai juge, je ne suis qu’avocat…

 

·        Luxure… vous vous dites, non, là, comme ça, on se dit qu’ici au moins on est en terrain plus solide… mais ce serait naïf. Quand il se passe ce qui s’est passé sur le terrain. Quand l’énergie partagée se mue en musique harmonieuse et passe de l’un à l’autre, mystique et mystérieuse, comme la balle des uns aux autres sans jamais choir, quand tout est facile, même si c’est exigeant, quand l’entente est parfaite et la communion instinctive.  Que croyez-vous ? Franchement ?? Ils couchent ensemble, c’est certain. Ils nient, tous autant qu’ils sont, mais une telle osmose ne serait pas possible. Quand ? Ou ? Qui ? Comment ? Qu’importe en vérité, et pour cela ils méritent votre condamnation

 

·        Paresse, Là, messieurs mesdames les jurés, j’ai à peine envie de vous le faire remarquer, mais pour les obtus je crains que ce ne soit nécessaire : le simple fait de régler si vite leur compte à leurs adversaire, sans leur offrir même le luxe d’un 4eme set, c’est bien la preuve qu’ils voulaient juste se coucher tôt. Bande de paresseux. Trop d’économie d’énergie est malhonnête quand il s’agit d’exploits sportifs. Coupables de paresse.

 

·        Gourmandise ? faut-il que je détaille ? les auriez-vous vus au buffet, se bâfrer de pâté, de gâteaux, d’alcools divers, de coca, de gâteaux encore, mais c’était orgiaque, ils bavaient tous plus les uns que les autres, perpétuellement insatisfaits, bande d’oiseaux lâchés sur des proies préparées pour eux et offerte à leur vice : la Gourmandise

 

·        Orgueil : Al Pacino aura le mot de l’ultime défaut de cette équipe navrante : « La vanité, c’est décidément mon péché préféré. C’est tellement fondamental. Le narcissisme, c’est notre propre opium ». (l’associé du diable). L’orgueil,, l’égo, le moi, le je, le jeu, le nous… les voilà dévoilés : ils n’ont douté de rien, pas un moment. Non. Quelle vanité vraiment, de se pointer à 6, dont deux filles, les pires de toutes, qui s’appuient sur leus épaules de leurs collègues pour avancer.

Tous les facteurs aggravant concourent, Bande organisée, récidive, absence de remords… Ils sollicitent votre clémence ? Circonstance atténuante de n’être pas les seuls au sein du club, dans le sport amateur? Argument d’autorité de ne s’être pas fait prendre par l’adversaire qui a passé un bon moment en leur compagnie dit-on ? Ne les écoutez pas ! Condamnez-les, et demandez un dédommagement !

(…) la, les minutes du greffe s’interrompent brusquement, du fait du pugilat entre la pacifique clisson1 et son avocat (le plus Bas d’Inter aurait dit Desproges). Par décence, je m’arrête aussi.

Mais de toutes façons, Le coupable est celui à qui le crime profite[3] si bien que devant une victoire telle que celle que je vous contais, il n’y a guère de doute. Heureusement, Diderot est meilleur avocat que moi, qui vous demande de réfléchir : Pourquoi punir un coupable, quand il n’y a plus aucun bien à tirer de son châtiment (Denis Diderot). Le mal est fait, et si le vrai coupable n’est pas celui qui a commencé, mais celui qui continue, nous leur octroieront un bénéfice jusqu’à la prochaine échéance.

N’allez pas en conclure comme Robert Sabatier, que « Dans un mauvais roman policier, le coupable n’est jamais loin, c’est l’auteur » je pourrai le prendre mal.

Résumiste-Récidiviste.

M la Maudite

 



[1] Anonymat demandé par le Procureur

[2] Le nom de l’avocat dont la qualité professionnelle pourrait être discutable à première lecture est tu par décence et par confraternité J

[3] Sénèque

Une Réponse

  1. Thierry Grenon

    Un “résumé” qui en dit long… Merci pour ce moment !
    Je regrette l’absence d’images (en couleurs), notamment pour illustrer le point sur la luxure…
    Cela aurait permis d’agrémenter le texte pour les moins littéraires et ainsi augmenter de façon significative ton lectorat.

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